Ce matin, le quotidien réunionnais qui n’est pas toujours très épais s’est fait encore plus fin que d’habitude. Jour férié oblige. De fait, il n’a qu’une seule page qui donne l’information suivante : Cette nuit, une étoile est descendue sur la crèche où se trouvait un enfant nouveau-né, tôt ce matin, les bergers sont venus l’adorer en chantant avec les anges et le reste des fidèles ne sauraient tarder à arriver pour exulter de joie à l’annonce de l’incarnation du Verbe.
C’est que les journalistes n’ont pas grand-chose à raconter sur les évènements de cette nuit. C’est que les journalistes n’ont qu’à redire encore et encore ce que nous fêtons depuis 2000 ans et que les prophètes ont déjà annoncé depuis plus de 4000 ans. Or, les journalistes aiment ce qui est nouveau.
Mais ils ont remarqué qu’il y avait plusieurs messes de Noël. Chacune est différente. La messe de la nuit, la messe de l’aurore et la messe du jour. Les trois messes traditionnelles qui marquent une progression dans la compréhension du mystère de la naissance du Fils de Dieu. S’il n’est pas obligatoire de suivre ces trois messes, il y a cependant de la beauté à découvrir la progression des trois célébrations de Noël.
La première messe est celle de la vigile. On l’appelle la messe de minuit. Au milieu de la nuit, elle est mystérieuse. Les premiers venus pour célébrer le mystère de Noël suivent une étoile et découvrent un enfant dans une mangeoire. Leurs yeux s’ouvrent alors à cette « magie de Noël », ou plutôt à cette joie et à cette paix qui leur est donné par un petit enfant sur la paille. Ils voient le simple sourire du petit d’homme qui leur raconte l’amour de Dieu pour eux. Ils regardent la Vierge Mère qui a enfanté pour eux le sauveur du monde. Ils sont réconfortés par saint Joseph qui les rassure par sa force virile et douce à la fois. L’âne et le bœuf sont aussi de la partie. Ils nous disent la simplicité du moment. Ils racontent par leur propre simplicité qu’il est facile de venir à la crèche. Même un âne en est capable. Il est facile de venir adorer l’enfant roi et de recevoir sa paix. Il suffit de suivre l’étoile. Il suffit de répondre à ce désir intérieur de paix et d’amour. Pas besoin de comprendre grand-chose. Mais il faut vivre ce qui est donné à la crèche. Le mystère de Dieu qui se fait homme est vécu plus que compris par des concepts. Un petit enfant dans le froid qui pourtant dégage une chaleur indicible dans le cœur.
C’est cela le mystère de Noël. Mais c’est aussi la messe de l’aurore. On l’appelle également la messe des bergers. Les bergers, ce sont ceux qui ont entendu un ange leur donner un ordre. Ils ont obéi à la Parole pour venir adorer l’enfant. Ils ne comprennent pas tout encore. Mais ils arrivent au petit matin pour découvrir cette lumière qui se lève. Ils se trouvent à la lisière entre la ténèbre de leur cœur, l’incompréhension de leur intelligence et de l’autre côté la lumière du Christ qui vient les illuminer. Ils croient déjà mais ne savent pas trop encore qui est cet enfant qui doit venir. Ils viennent déjà mais n’ont pas encore laissé de côté le mal et le péché dans leur vie. Ô découverte inespérée pour les veilleurs de la nuit que cette aurore qui né. Ô découverte inespérée pour ces pécheurs que la lumière du salut qu’ils commencent à deviner et qui se cache dans ce petit Jésus : Dieu sauve.
La découverte de la présence de Dieu, la découverte du salut, c’est cela Noël. Mais comme nous l’avons chanté hier à l’introït de la messe de la vigile : « Aujourd’hui vous le saurez : le Seigneur va venir et il nous sauvera ; demain vous verrez sa gloire. » La messe du jour de Noël, c’est l’éclat de la gloire de Dieu qui resplendit dans nos cœurs de toute sa force. Nous sommes appelés à la lecture du Prologue de l’Évangile de saint Jean à entrer dans la contemplation de la gloire de Dieu, et nous sommes ravis par cette éclatante lumière. Dieu est avec nous, Dieu nous sauve et le Verbe « est la vraie lumière, qui éclaire tout homme en venant dans le monde. […] A tous ceux qui l’ont reçu, il a donné de pouvoir devenir enfants de Dieu, eux qui croient en son Nom. »
« Mais le monde ne l’a pas reconnu ». Malheureusement le Quotidien n’a pas fait sa Une sur la venue du Christ. Tout au plus aura-t-il parlé de la fête de Noël, en souhaitant un laïc « joyeuses fêtes » pour ne pas risquer de paraître accorder de l’importance à la lumière qui sauve le monde, à la naissance dans la crèche de l’enfant roi.
Cette lumière est donnée à ceux qui veulent bien l’accueillir : d’abord en étant là, puis en acceptant de voir un peu plus en contemplant cette présence d’un Dieu qui nous sort de nos ténèbres et qui nous sauve et enfin, en accueillant la plénitude de sa gloire et en chantant avec les anges : « Gloire à Dieu au plus haut des cieux et paix sur terre aux hommes qui l’aiment. »
Noël, c’est Dieu qui entre dans la vie de l’homme et qui invite l’homme à entrer par la crèche, par le mystère de l’incarnation… à être éclairé de la lumière qui se lève et qui mène à la plénitude de la gloire de Dieu.
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