« Jésus ne veut pas la maladie mais la guérison »
L’idée que la maladie correspond à un châtiment divin traverse les siècles et les continents. Encore aujourd’hui, nombreux sont ceux qui pensent : « Les malades ont dû faire quelque chose de mauvais, peut-être un péché caché, qui a attiré ce châtiment corporel ».
Les maladies de la peau déclenchent stress et angoisse. La peau, frontière entre mon corps et les autres, visible et sensible, concerne non seulement le rapport à soi-même mais aussi les relations sociales.
Les lépreux font peur : plaies et lambeaux de chair. La famille et les voisins redoutent la contagion. Dans la première lecture tirée du livre des Lévites, les lépreux sont tenus d’annoncer leur présence en criant : « Impur ! Impur ! » Honte personnelle et exclusion sociale.
Jésus n’est pas venu pour les bien-portants mais pour les malades. Il n’a pas fui la rencontre avec le lépreux dont parle saint Marc dans son évangile. Dans sa détresse, le lépreux tombe à genoux pour le supplier avec foi : « Si tu le veux, tu peux me purifier ». La misère humaine rencontre la miséricorde divine. Le cœur serré du lépreux rejoint le cœur magnanime de Jésus. La frayeur du malade déclenche la compassion de Jésus, remué dans ses entrailles. Dieu s’est approché du malade. Jésus ne craint pas de toucher ce corps infecté et déformé. Il joint le geste à sa parole. La parole de Jésus guérit : « Je le veux, sois purifié. » La chair du lépreux refleurit. Corps et âme, il est inclus dans la vie sociale.
En accomplissant ce miracle, Jésus ne cherche pas la renommée ; tout au contraire, il demande au lépreux la discrétion et l’accomplissement de la Loi de Moïse. Ivre de joie, le lépreux proclame sa guérison miraculeuse. Il devient témoin de la présence du Messie en Israël. Jésus, l’Envoyé du Père, enlève le mal et la maladie.
Le but de la guérison dépasse la guérison. Il s’agit d’une manifestation des merveilles de Dieu présent au cœur des souffrances de l’humanité. Jésus n’intervient pas en magicien ou en guérisseur mais en prophète. La guérison du lépreux fait signe à ses contemporains. Dieu est proche. Dieu le Père invisible s’est révélé en son Fils bien-aimé, Jésus.
Saint Thomas d’Aquin enseigne que Dieu n’a pas l’idée du mal ; autrement il ne serait ni bon ni parfait et il ne faudrait pas l’aimer. Fra Angelico a représenté dans ses fresques du couvent Saint-Marc de Florence (Italie) Jésus, les yeux bandés, frappé par des soldats romains au cours de sa Passion. Manière picturale de prêcher que Dieu n’a pas de mauvaises pensées : « Seigneur, tes yeux sont trop purs pour voir le mal » (Habaquq 1, 13). Dieu ne veut que le bonheur de l’humanité.
Dans sa miséricorde, Jésus a voulu que le salut de l’homme passe par l’homme. La puissance de Dieu se déploie ainsi en synergie avec les hommes.
Saint Martin de Porrès (Lima, +1639), infirmier et ami des pauvres, grand thaumaturge, déclarait humblement : « Je soigne et Dieu guérit. » Il prenait soin des malades et des pauvres à la rue. Mettant en œuvre ses connaissances de barbier-infirmier, il allégeait leur douleur. Mais la guérison du corps et de l’âme relevait de la grâce de Dieu.
Un médecin ou une infirmière ne sauraient pas agir en « ingénieurs » du corps. « Distinguer pour unir », enseignait Jacques Maritain (Toulouse, +1973). Il convient de distinguer la science médicale avec l’autonomie de ses lois de la vie spirituelle, non pas pour les séparer ou les opposer, mais pour les unir. L’homme est un, avec ses dimensions physiques, affectives, rationnelles et spirituelles. Jésus accorde un salut intégral qui intègre toutes les composantes de l’humanité en les unissant dans l’unicité de la personne.
Jésus a guéri le lépreux, corps et âme. Cet ancien malade a été recréé dans sa dignité humaine, appelé à glorifier Dieu par sa vie (cf. I Cor 10, 31). Inséré dans la communauté humaine et religieuse d’Israël, l’ancien lépreux a témoigné de la vie nouvelle apporté par Jésus. Celui qui était triste loue Dieu dans la joie. Celui qui souffrait physiquement rend grâce pour sa santé. Celui qui était mis à l’écart obtient une place de choix au cœur du Royaume des cieux inauguré par Jésus.
Prions pour le corps médical qui donne des soins et pour les prêtres qui donnent les sacrements dont l’onction des malades, source de guérison spirituelle et parfois physique.
Imitons la foi du lépreux ; prions avec sa confiance. N’ayons pas honte de proclamer publiquement les prodiges accomplis par Jésus en nous et à travers nous. Rendons grâces pour tant de grâces !
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