Jésus mange avec les pécheurs et les publicains et cela pose problème. « Les pharisiens et les scribes récriminaient contre lui : ‘‘Cet homme fait bon accueil aux pécheurs, et il mange avec eux !’’ » C’est très gênant que Dieu aime les pécheurs ! Comment expliquer que se mélange le pur et l’impur ? Si je mets une goutte d’eau sale dans une bouteille d’eau pure, c’est toute l’eau qui devient non potable. Si les pécheurs ont accès à Dieu, alors c’est que Dieu n’est pas pur. Et si Dieu n’est pas pur, alors il n’est pas Dieu.
Voilà la manière de penser des pharisiens et des scribes. Voilà la manière de penser du fils prodigue qui veut retourner vers son père, mais comme serviteur, sans entrer vraiment dans sa maison. Voilà la manière de penser du fils ainé qui vit dans la maison de son père, mais en vivant un peu en parallèle et puis en reprochant au père l’accueil de son frère souillé par sa débauche.
Jésus nous propose en nous racontant cette parabole de ne pas tant regarder d’en bas, mais d’en haut. Ce qu’il nous montre à voir, c’est plus le cœur du Père que celui des deux fils. Si non descend avec le fils prodigue dans les bas fond de son péché et qu’on a presque l’impression de manger les caroubes des cochons avec lui, c’est pour nous faire comprendre l’amour infini du Père. Et c’est cela qui intéresse Jésus et qui devrait nous intéresser aussi.
Ouvrons donc le livre et lisons dans le cœur du Père :
Premièrement, Dieu donne tout. Il donne tout avec une générosité sans limite. Le fils cadet exige son héritage. Je l’aurai mis à la porte avec mon pied aux fesses ! Le Père lui donne sa part et il se comporte pareil avec l’aîné à qui il dit à la fin de la parabole : « Toi mon enfant, tu es toujours avec moi, et tout ce qui est à moi est à toi. »
Deuxièmement, Dieu aime gratuitement. Il n’attend pas de ses fils une certaine attitude pour les aimer. Il les aime parce qu’ils sont ses fils et sans condition. Il n’y a rien qui puisse faire que Dieu n’aime pas ses enfants. Ni leur ingratitude, ni leur péché, ni leur indifférence.
Troisièmement, Dieu laisse libre. Il ne retient pas ses enfants. Beaucoup on peur de se donner à Dieu parce qu’ils ont l’impression de perdre leur liberté. Mais jamais Dieu ne nous retient contre notre volonté. Non pas qu’il se désintéresse de nous, au contraire, mais accepte qu’on puisse ne pas trouver en lui notre bonheur, même s’il sait que ce n’est que dans sa maison que ses fils trouveront leur véritable accomplissement.
Quatrièmement, Dieu est patient et ne se désespère jamais. Rien ne peut venir à bout de la patience du Père. Il regarde à la fenêtre, et à peine le fils revient, qu’il courre vers lui. Il est capable de guetter le moindre signe de notre retour pendant des années. Il sait qu’il y a toujours espoir de nous voir revenir à lui.
Cinquièmement, Dieu se réjouit. « il y aura de la joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se convertit, plus que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui n’ont pas besoin de conversion. » (Lc 15, 7) Le Père de la parabole est un feu d’artifice de joie. Joie qui vient de son amour patient et libérateur qui rencontre le pécheur qui vient vers lui. Quand Jésus allait manger chez les pécheurs il était heureux. Quand nous pécheurs, nous allons à Jésus, il se réjouit de tout son cœur.
Sixièmement, Dieu est miséricordieux et offre toujours son pardon. Le fils revient, il est déjà pardonné. Le Père n’a que faire du raisonnement bien pensé du fils qui ne veut être plus qu’un serviteur. Il l’accueille et lui pardonne dans la joie.
Septièmement, Dieu nous restaure dans notre dignité et nous fait entrer dans sa joie. Le pardon qu’il nous offre, ce n’est pas un simple retour en arrière comme si rien ne s’était passé. Le Père nous redonne la place du fils que nous avions perdu avec en plus la joie de nous avoir retrouvé. C’est la joie du Père, c’est la dignité du Père, mais elles nous sont partagées et nous pouvons en vivre pour de vrai.
On ne peut entrer dans le Royaume de Dieu qu’en regardant du côté de Dieu et voyant comme il voit. Ce qui nous empêche d’entrer dans le Royaume de Dieu, ce n’est pas tant la saleté de notre péché mais bien plutôt qu’on a du mal à accepter d’entrer dans la joie de l’amour de Dieu en voyant comme Dieu voit. Il nous faut nous plonger dans la miséricorde de Dieu et accepter de manger avec lui en retournant à son amour qui nous transforme et nous redonne notre dignité perdue.