Il m’est arrivé plusieurs fois de rencontrer des chrétiens qui s’excusent de ne pas prier comme il faut et qui disent : « Moi la prière, je sais pas faire ; je ne sais pas prier ; ou bien je ne prie jamais. » Ça m’étonne à chaque fois. D’abord parce que je me demande ce qui s’est passé ou pas passé pendant le catéchisme et dans les familles pour qu’on ne leur ai jamais appris à prier. Comment peut-on être chrétien si on ne prie pas ?
C’est peut-être ce qu’avaient compris les apôtres en côtoyant Jésus. Ils le voyaient prier et se rendaient bien compte que leur propre prière était un peu fade. Ils voulaient prier. Et c’est déjà un bon début. On ne prie pas si d’abord on ne désire pas prier. Et peut-être d’ailleurs que c’est le commencement même de la prière que de demander à Jésus qu’il nous apprenne à prier comme l’ont fait les apôtres.
Ceux qui disent qu’ils ne prient pas rajoutent parfois cette petite réflexion : « Je ne prie pas mais, moi, je parle à Dieu directement. » C’est très étonnant ! On dirait qu’ils n’ont pas appris à prier mais que d’une certaine manière, ils ont trouvé le chemin de la prière sans trop s’en rendre compte. Parce que la prière, qui commence par le désir d’entrer en relation avec Dieu continue par le fait de lui parler simplement avec le cœur.
C’est d’ailleurs la première chose que Jésus enseigne à ses disciples qui ont envie de prier, c’est qu’il faut s’adresser à Dieu directement, comme on parle à son propre père. « Quand vous priez dites Père. » Jésus utilise le mot Abba, qui en hébreu veut dire papa. On peut s’adresser à Dieu aussi directement que cela. Jésus ne donne aucune technique de prière. Il ne dit pas de se mettre debout ou à genoux. Il ne dit pas à quelle heure il faut prier. Il se contente de nous dire l’essentiel de la prière : parler à Dieu en s’adressant à lui avec confiance. Donc non seulement on peut parler à Dieu directement, mais en plus, c’est exactement ce qu’il faut faire comme nous l’enseigne Jésus lui-même. Dites Abba.
Certains n’osent pas trop cette rencontre directe avec Dieu parce qu’ils ont peur de le gêner. Ils s’imaginent que parce que Dieu est aux Cieux, au-dessus de tout, ils ne doivent pas le déranger avec des choses peu importantes, avec leurs broutilles. Ceux-là s’imaginent peut-être que Dieu est un business man trop occupé avec qui on n’arrive pas à avoir de rendez-vous, ou bien quelqu’un qui se considère au-dessus des autres et qui ne se préoccupe pas des petits. Rien de plus faux. En Jésus Dieu s’est mis à notre niveau et s’est préoccupé des réalités de notre quotidien. Et Jésus nous invite à nous adresser à Dieu comme à un père aimant qui a toujours de la place pour son fils. Nous pouvons demander à Dieu dans notre prière tout ce dont nous avons besoin, ce que Jésus appelle notre « pain quotidien ». On peut demander les choses les plus simples et les plus basiques comme les plus grandes et difficiles parce que Dieu est notre père et qu’il aime nous s’occuper de ses enfants plus que de toutes les affaires importantes du monde. Pas un seul cheveu de notre tête ne tombe sans que Dieu ne le sache. (Cf Lc 21)
N’ayons donc pas peur de nous adresser à ce Dieu qu’on ne peut pas déranger. Oui… mais… disent certains. Oui mais moi je n’ose pas parce que je ne suis pas un saint, parce que je suis un pécheur. Encore une mauvaise raison de ne pas prier ! Obstacle assez récurent chez les chrétiens. La prière n’est pas réservée aux saints. Au contraire, c’est l’inverse. C’est parce qu’on n’est pas des saints, qu’on est des créatures fragiles, qu’on a besoin de s’adresser à Dieu. Si on peut parler à Dieu directement, c’est parce que nous sommes ses enfants qu’il aime, pas parce qu’on le mérite par notre sainteté. Et c’est justement en découvrant cette relation filiale que nous entrons dans la relation à Dieu, que nous sommes rendus saints par sa présence. La prière est le lieu où Dieu nous sanctifie dans un long et doux dialogue d’amour d’un père avec son enfant.
Si dans le Notre Père, nous disons : « Pardonne-nous nos offenses ». C’est donc que nous pouvons prier alors que nous sommes pécheurs. C’est pour les pécheurs que nous sommes que la prière existe. En revanche, il est vrai que la prière nous invite à la conversion et nous donne de changer. Quand on entre en dialogue avec Dieu, on a envie de changer. Quand on s’approche de lui conscients de notre imperfection et de la grandeur de son amour de père, on est invité à vivre de cet amour et à le redonner aux autres, notamment en leur pardonnant le mal qu’ils nous font. « Pardonne-nous nos offenses… comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés. »
Voilà donc deux des nombreux enseignements de la prière du Notre Père. Dieu est notre Père qui nous invite à un dialogue de cœur à cœur avec lui qui nous transforme pour nous faire passer du péché à la sainteté en faisant de nous des fils de Dieu.