Messe de Noël, Lycée Levavasseur
Tiens, au fait, le mot noël, ça veut dire quoi ? Ça fait des jours qu’on en parle et on va encore en parler, mais c’est quand même un mot bizarre ! Ça vient du latin. Ça vient toujours du latin ce genre de trucs. Ça vient du latin natalis. Le « t » est tombé. Ça a fait « naalis ». Et puis, deux « a » ça fait un « o ». C’est bien connu. De « naalis » on a « nolis ». Et puis on finit par avoir noël. Et natalis en latin, c’est la naissance.
La naissance ! Mais pas n’importe quelle naissance. Pour comprendre, il faut remonter à longtemps. Autour de l’an 0, quand un petit enfant est né dans une petite bourgade appelée Bethléem. Il est né dans une crèche, c’est-à-dire dans une mangeoire. Il était pauvre. Il faisait froid. On dit qu’il avait tellement froid que même l’âne et le bœuf ont ressenti - pour la première fois dans l’histoire des animaux de la ferme - de la pitié. Les parents de l’enfant à l’époque, avaient fait un long voyage depuis la ville de Nazareth dans le nord du pays. Joseph le père et Marie la mère étaient tous deux descendants de la famille royale. Mais ça faisait bien longtemps que la fortune avait quitté la famille. Une naissance misérable dans la plus petite des bourgades du plus petit des peuples de la région.
Et pourtant on en parle encore. Et pourtant on a même dû fabriquer un mot spécial pour parler de cette naissance. Non pas une naissance, mais LA naissance. Noël. C’est qu’il a dû se passer quelque chose d’extraordinaire pour qu’on s’en souvienne et que l’on fête encore l’anniversaire de cet enfant qui aurait aujourd’hui 2022 ans.
J’ai cherché dans les livres et dans les musées et j’ai trouvé pleins de choses sur cette naissance. J’ai notamment trouvé un nombre incroyable de peintures qui dépeignent ce qui s’est passé. Certaines sont belles et d’autres le sont moins. Mais ce qui m’a frappé à chaque fois, c’est que ça raconte la même histoire. Il n’y a quasiment aucune originalité. Et franchement cette histoire ne mérite pas qu’on en parle autant. Un enfant qui naît dans la misère. Il n’y a rien à raconter. Il n’y a rien à voir. Et pourtant tout le monde regarde et tout le monde raconte.
Pour essayer de comprendre, j’ai donc posé la question à un des témoins. Il était berger à l’époque et il a assisté à la scène. Il n’avait pas grand-chose d’autre à raconter que ce qui est déjà écrit dans l’évangile. C’est d’ailleurs lui qui en avait parlé à l’évangéliste pour qu’il écrive. Mais, en me redisant les mêmes choses, il avait les yeux qui pétillaient de joie. Sa voix rauque devenait douce et paisible au fur et à mesure qu’il me parlait.
Je voulais en savoir plus. J’ai donc questionné le berger non plus sur la scène que je connaissais par cœur, mais sur lui-même. Il s’avère que notre berger est un homme très simple. Il ne sait ni lire ni écrire. Mais il sait rire et pleurer. Il sait résister aux intempéries et se réjouir du soleil qui brille. Il sait contempler les étoiles dans le ciel. Et, chose très étrange, jusqu’au jour de LA naissance, il avait toujours faim.
Je lui ai demandé son nom et il m’a répondu qu’il s’appelait comme le village d’où il venait : Bethléem. Il semble qu’il partage tellement le sort de son village qu’il en porte le nom. Il m’a expliqué que Bethléem, en hébreu, ça veut dire « la maison du pain ».
- « L’enfant qui est né à Bethléem [m’a-t-il dit] ils l’ont mis dans une mangeoire. Et quand ils l’ont déposé là, moi, j’étais dehors. Je m’étais approché à cause de l’étoile qui brillait tellement qu’elle éclairait plus que la lune. Mais, ce qui m’a frappé, c’est que je n’avais plus faim. » - « Tu n’avais plus faim ? » Non, j’avais juste envie d’aller voir ce qu’il y avait dans la mangeoire. J’avais juste cette envie irrésistible de participer à cette paix qui flottait autour de l’étable. Comme si cette paix allait me rassasier. Je suis donc entré et là, j’ai compris. »
- « Tu as compris quoi ? » - « J’ai compris… tout. » - « Tout ? » - « J’ai compris qui il étais et qui j’étais moi-même. J’ai compris pourquoi j’avais toujours faim et pourquoi rien ne pouvait jamais me rassasier. J’ai compris pourquoi je m’appelais comme mon village : la maison du pain. J’ai compris que c’était moi la mangeoire dans laquelle cet enfant venait d’être déposé. Cet enfant, il était venu pour moi, pour habiter en moi. Le pain venu du ciel, descendu dans la maison du pain, descendu dans mon cœur pour me rassasier de son amour. »
- « Juste en le voyant tu as compris tout ça. » - « Juste en le voyant, j’ai compris tout ça, d’un coup. Mais je ne pouvais rien dire. J’étais comme muet. Je ne pouvais que sourire. Et il m’a souri à son tour comme pour me montrer qu’il avait vu que j’avais compris. Oh la joie de ce sourire ! Ce n’était pas le sourire d’un enfant ; c’était le sourire d’un Dieu. Dieu venait dans une mangeoire à Bethléem. Dieu venait dans mon cœur affamé. Je n’ai plus jamais eu faim. Je n’ai plus jamais quitté ce sourire que j’ai toujours. Je n’ai plus jamais oublié la paix profonde que m’a donné l’enfant de la crèche au jour de sa naissance. »
- « J’étais pauvre et j’avais faim et il m’a rassasié de bonheur. C’était il y a 2022 ans, et depuis j’ai vécu de ce sourire du Dieu qui s’est fait homme pour que je sois rempli de la joie de vivre de sa vie divine. »
- « Peux-tu me montrer où est la mangeoire pour que je sois moi aussi rassasié ? » lui ai-je alors demandé - « Suis l’étoile. » - « Quelle étoile ? » - « L’étoile de Bethléem, celle qui brille au-dessus de la maison du pain. Je crois que vous l’appelez aujourd’hui « eucharistie ». Le pain céleste qui descend du ciel pour te donner ce sourire de Dieu. Suis cette étoile qui brille aussi dans ton cœur, parce que toi aussi tu t’appelles Bethléem. Toi aussi tu es la maison qui reçoit le pain. Toi aussi tu as faim du sourire de Dieu qui change la vie. »
- « Tu voulais savoir ce que Noël veut dire. Noël c’est cela. Ça veut dire LA naissance. La naissance de Jésus à Bethléem, LA naissance du sourire de Dieu dans ton cœur, LA naissance d’une vie nouvelle où tu seras enfin rassasié. »
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