Après 30 années de vie cachée, Jésus commence son ministère en étant baptisé dans le Jourdain par Jean le Baptiste. 30 ans d’attente. Ça y est, ça démarre. Et voilà qu’à peine commencé, Jésus s’en va passer 40 jours dans le désert à jeûner, à prier et à être tenté. Même le Fils de Dieu n’a pas été épargné par les lois parfois rudes et difficile de toute vie chrétienne vraiment féconde.
La première de ces règles, c’est que rien ne se fait de bon et qui porte du fruit qui ne soit pas d’abord nourri dans la prière. La prière très longue, la prière longue et la prière courte. Jésus s’est préparé dans le silence de sa vie cachée pendant 30 ans à être obéissant à ses parents, à grandir patiemment, à travailler humblement. La vie chrétienne dans la fidélité quotidienne est la première des préparations pour que nous puissions porter du fruit. Combien de saints à l’image de Jésus ont passé des années dans une apparente infécondité humaine, spirituelle et apostolique ? On pense à saint Dominique par exemple qui passe des années dans un cloître avant de fonder l’ordre des prêcheurs.
Longue préparation, mais visiblement pas encore suffisante. Après 30 ans de silence, Jésus débute son ministère par 40 jours supplémentaires – intenses – de prière et de pénitence. Jésus se met à part, il nourrit son action dans la présence aride de la prière. Il jeûne et remet tout à son Père. Lui qui est le Fils de Dieu prend le temps de puiser à la source : l’amour de son Père. Combien plus devons nous remettre les grands projets de notre vie dans les mains du Père. Reconnaître que c’est lui qui donne du fruit et que nous ne sommes que des instruments de sa grâce. Plonger dans la nourriture de sa Parole plus que de compter sur les forces fragiles de notre corps, sur nos propres capacités.
On verra souvent Jésus dans ces trois années de ministère partir la nuit pour prier avant des journées bien chargées. Préparation longue de 30 ans, moyenne de 40 jours et courte de la prière simplement quotidienne. Voilà la racine de toute l’action de Jésus : le désert.
Ce silence du désert, de la prière n’est pas vide, loin de là. Dans le désert Jésus a entendu deux voix : Celle de son Père et celle du tentateur. Deux voix qui s’affrontent en lui-même. C’est ce qu’on appelle la tentation : la voix de Dieu et celle du démon qui sont en totale contradiction et qui cherchent chacune à toucher notre cœur. Les deux retentissent avec force dans le désert, dans le silence. Le texte est assez explicite : c’est parole contre parole ; vérité contre mensonge pernicieux. Jésus répond au tentateur qui perverti la Parole de Dieu en utilisant la vérité de la Parole de Dieu.
Si Jésus répond si facilement et si simplement aux tentations, c’est qu’il est accordé à la volonté de son Père. 30 ans, 40 jours de méditation de la Parole. La seule arme qui déjoue les plans du tentateur avec la facilité de quelques mots prononcés. Mais prononcés non pas comme des formules magiques. Bien au contraire, prononcés comme venant du plus profond des entrailles qui ont été façonnées par de longues heures de présence à Dieu.
La Parole de Dieu n’est pas une formule magique pour éloigner du tentateur plein de pièges et de perfidie. C’est une nourriture qui nous transforme en ce qu’elle nous dit et qui nous rend fort. Ceux qui fréquente la Parole de Dieu dans le désert de la prière reconnaissent instantanément la voix du mensonge. Ils ont la ressource nécessaire pour ne pas l’écouter.
Voilà ce que Jésus a fait pendant son carême. Et c’est le chemin que nous prenons également : retrouver la présence de Dieu dans le silence et à l’écoute de sa Parole afin d’être transformés et fortifiés pour le combat de la foi.
Les chrétiens qui ne trouvent pas dans le désert la source de leur action ne résisterons pas à la tentation. Ils seront balayés par le tentateur pour se prosterner devant les idées du monde, devant la gloire de la réussite sociale ou la peur d’avoir faim. Certains paraîtrons peut-être pendant un temps avoir réussi. Et même d’avoir eu quelque succès apostolique. Mais tout cela ne serait qu’illusion.
Le tentateur promet les royaumes de ce monde et parfois il le donne à ceux qui l’écoutent. Mais il ne peut pas donner le seul Royaume qui en vaille la peine, le Royaume de Dieu. Il se cache derrière la Parole de Dieu pour nous donner bonne conscience mais ce qu’il propose est creux et sans fondement.
Le seul fondement, c’est de suivre le Christ dans le désert. C’est de se nourrir de la Parole plus que du pain ; d’accepter humblement de prendre le temps long de la prière plus que de céder à s’agiter pour avoir tout tout-de-suite ; d’accepter de faire confiance à Dieu.