Il y a quelques années j’ai fait une retraite dans un monastère. J’y étais allé pour me reposer et pour prier. Rien de très original pour une retraite ! La base ! Mais j’avais quand même dit aux sœurs que j’étais disponible pour les aider deux ou trois après midi dans la semaine. Me voilà donc à l’entrée de la clôture en habit de travail. La sœur m’ouvre et me tend une paire de gants et une pioche. Je la suis jusqu’au champs où s’alignaient les rangées de vigne. Il s’agissait de piocher autour de chaque pied de vigne. Me voilà donc tout seul à bêcher le premier, puis le deuxième plant et ainsi de suite. Arrivée à la fin de la rangée au bout de 3 heures j’ai relevé la tête et vu qu’il y avait au moins 30 rangées pareilles… dans ce seul champ.
Sentiment d’impuissance et d’infini. Sentiment de fatigue sans fin qui m’envahit alors. Mais je n’étais pas là pour bêcher tout le champ. J’étais là pour ce qui étais à ma portée dans le temps impartie. Les sœurs se chargeraient bien du reste de toute façon. Elles avaient l’habitude de faire sans moi. Et même je pense que c’était plutôt moi qui avais besoin de courber le dos. C’est elles qui me faisaient la charité et non pas le contraire.
Voilà le sentiment que nous pouvons avoir lorsque le Seigneur nous demande par la bouche d’Isaïe de « consoler son peuple », de « préparer les chemins du Seigneur » en comblant tout ravin et en abaissant toute colline. La tâche est beaucoup trop grande et nous sommes tentés de nous décourager.
Abaisser mon orgueil pour prendre le chemin de l’humilité ! Maitriser mes passions et marcher droit selon la Loi de Dieu ! Et tout ça avant Noël. Mon propre cœur je ne le maitrise pas. Il se rempli de mauvaises herbes et j’ai l’impression que le temps que j’en arrache une il y en a dix autres qui poussent là où je suis déjà passé.
Et ne parlons même pas de la mission qui nous est donné d’annoncer aux autres le Royaume. « Élève la voix, ne crains pas. Dis aux villes de Juda : « Voici votre Dieu ! » » (Is 40) Comment pourrais-je aplanir chez les autres ce que je n’arrive même pas à aplanir dans mon propre cœur ? Comment abaisser l’orgueil du monde lorsque j’en suis rempli moi-même ?
J’ai appris pendant cette retraite, dans cette vigne qu’il suffisait de se courber et de bêcher la liane qui était devant moi. Les sœurs faisaient du bio et donc ne cherchaient pas l’efficacité des produits chimiques. Dieu fait du bio et nous demande d’y participer en nous mettant au travail. Le reste c’est lui qui le fait en nous donnant sa vie, sa bio !
Aplanir ses chemins, rendre droit ses sentiers, c’est attendre la Sagesse qui vient d’en haut. C’est se laisser ensevelir par le monde dans les eaux du Jourdain par la conversion du cœur. Nous n’aurons jamais fini ce boulot de titan si nous regardons à hauteur de nos propres yeux. C’est bien pour ça que le sauveur vient, celui qui est plus grand que nous, celui qui ne nous baptise pas dans l’eau mais dans l’Esprit Saint.
C’est le Seigneur qui sauve ! C’est lui que nous attendons ! Voilà la seule préparation nécessaire à la fête de Noël. L’attendre. L’attendre au milieu du champs en faisant au mieux ce qui se présente devant nous. Travailler mais en comptant sur sa grâce pour abaisser ce qui nous dépasse et relever ce qui est trop lourd pour nos propres forces.
Le Seigneur vient et comme le dit saint Pierre, il « ne tarde pas à tenir sa promesse » (2P 3). Promesse de nous donner un ciel nouveau et une terre nouvelle où résidera la justice. Promesse de transformer nos cœurs afin que nous vivions de sa joie et soyons remplis de sa paix.
« Certains prétendent qu’il a du retard. » (2P 3) nous dit saint Pierre. Ce sont ceux qui regardent l’ampleur de la tâche et qui ne comprennent pas que c’est le Seigneur qui nous purifie dans sa venue. Ils s’agitent alors pour essayer de tout préparer avant que le Seigneur vienne. Ceux-là ne seront jamais prêts ! On est prêt quand on a enfin accepté que seul le Christ est notre sauveur et qu’il vient.
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