Jésus mort et ressuscité est sur le point de partir pour remonter au ciel d’où il est venu. Il dit à ses disciples les dernières choses. Non pas comme un dernier conseil, mais bien plutôt une dernière parole qui résume toutes les autres. Plus qu’une phrase, il leur donne sa personne comme il l’a fait sur la croix en donnant sa vie. Il est la Parole et il leur laisse la Parole : « aimer vous les uns les autres comme je vous ai aimés. » C’est en quelque sorte, pour remplacer sa présence qui va faire défaut aux disciples que Jésus donne son commandement de l’amour. Nous aimer les uns les autres comme il nous a aimé devient le nouveau lieu de l’incarnation, de la présence de Dieu parmi les hommes.
Jusque-là on reconnaissait les disciples de Jésus parce qu’ils suivaient le maître sur les routes de Galilée et de Judée. Ils étaient disciples parce que Jésus vivait avec eux, qu’ils avaient le privilège de le connaître et d’écouter ses paroles. Désormais, on sait qui est disciple de Jésus à l’amour qu’il a pour les autres.
C’est un changement fondamental dans la vie des disciples et ils semblent un peu déroutés. Jésus va s’en aller et il donne des frères à aimer à la place. Le problème, c’est qu’il faut faire comme Jésus et laver les pieds de ses frères. Or les pieds ça pue ! Au fond, malgré toutes les difficultés que la suite de Jésus a dû représenter pour les disciples, c’était probablement plus facile que de devoir aimer les autres et se mettre à leur service. Il va maintenant falloir vivre ce qu’ils ont commencé à expérimenter pendant trois ans.
Jésus veut instaurer le Règne de l’Amour ! Tant qu’il était là présent avec ses disciples, ils y arrivaient à peu près. Mais maintenant qu’il remonte aux cieux et qu’il ne laisse que son commandement, ça semble une idée très utopique.
Mais Jésus n’est pas un idéologue qui imagine un monde merveilleux qui n’existe pas. Il connaît le cœur de l’homme. Il sait qu’il est capable des plus grandes atrocités. N’a-t-il pas été crucifié par ceux qui se disaient fils d’Abraham ?
En donnant son commandement, Jésus renouvelle la création blessée par le péché. « Voici que je fais toutes choses nouvelles. » dit celui qui siège sur le trône. Jésus est le Fils de Dieu qui a bien voulu faire sa demeure parmi les hommes. Maintenant qu’il repart vers son Père, il laisse cette maison en héritage. Une maison qu’il a renouvelée de l’intérieur. Il a transformé ce monde par sa naissance, sa mort et sa résurrection. Le monde qui ne pouvait pas aimer a été rempli de l’amour de Dieu. Tout est prêt pour la venue de l’Esprit Saint. Désormais le règne de l’Amour qui était jusque-là inaccessible devient une réalité possible par la grâce qui est répandue sur lui.
Et c’est en cela que le commandement de Jésus est un commandement nouveau. L’Ancien Testament demandait déjà pourtant bien d’aimer son prochain. Ce qui est nouveau, c’est que Jésus rend possible ce commandement en nous donnant son amour. « Aimer vous les uns les autres comme je vous ai aimés. »
Désormais, ce n’est pas simplement un amour humain rendu impossible par le péché que nous devons vivre. Désormais nous sommes remplis de l’amour de Jésus qui nous permet de nous aimer les uns les autres de ce même amour qu’il nous donne. Cette réalité nous dépasse totalement. De soi, elle nous est inaccessible et pourtant c’est possible par la mort et la résurrection de Jésus.
L’amour n’est plus l’utopie d’un monde meilleur mais un don que Dieu nous fait en renouvelant notre humanité par sa présence. Ce monde ne peut alors l’être que dans la mesure où nous accueillons la présence de Dieu. Il ne peut se mettre en place que par l’écoute du Christ qui nous commande de nous aimer et qui le rend possible par sa grâce. Si Jésus n’est pas au centre de notre vie, nous ne pouvons pas aimer, nous ne pouvons peut-être au mieux faire en sorte de ne pas trop nous haïr en nous ignorant les uns les autres. Si nous le mettons au centre de notre vie, alors nous sommes rendus capables d’obéir à son commandement.
C’est à cela qu’on reconnaît les disciples de Jésus, à l’amour qu’ils ont les uns pour les autres.