Les mains vides à la crèche
Saint Nuit de la Nativité Prêché à la cathédrale de S. Denis
Depuis que les anges les avaient quittés, ils étaient tous surexcités et ils n’avaient qu’une idée en tête, ces petits bergers, aller voir ce signe annoncé. Alors, la petite troupe se mis en marche et trouva l’étable, et tout comme les anges avaient dit : le nouveau-né emmailloté dans la mangeoire. Ils avaient du mal à faire silence et à rester calme. Alors Marie prit l’enfant dans ses bras pour le montrer aux petits bergers qui jubilaient. Certains chantaient encore le chant des anges entendu dehors près du feu, d’autres s’exclamaient « qu’il est beau ! » « -T’a vu ! Il m’a souri ! » « - chut ! Moins de bruit tu vas le réveiller ! ». Puis les petits bergers se mirent à offrir des cadeaux à Marie : l’un son pipeau, l’autre un manteau de laine, un autre son chapeau, un autre un petit jouet de bois qu’il avait sculpté en gardant les bêtes. Mais un peu retrait, un des petits bergers n’osait s’avancer parce qu’il était très pauvre, et il n’avait rien à offrir à la Sainte Famille. Il s’appelait Juda, c’était le plus jeune de la petite troupe. Alors Marie lui fit signe d’approcher. Les autres continuaient de tendre leurs présents dans un joyeux vacarme. Alors Marie dit au petit Juda : « - Je ne peux recevoir leur présents, veux-tu bien m’aider ? ». Et Juda ne dit pas un mot mais acquiesça d’un signe de tête sans trop savoir ce que voulait cette très belle dame. Marie déposa délicatement l’enfant dans les bras de Juda, et reçu les présents des autres. Et le petit berger fut saisi de stupeur et de crainte, il n’avait jamais ressenti cela auparavant, il plongea son regard dans celui de l’enfant qui semblait déjà lui parler sans dire un mot : « Juda, je suis ton Dieu, moi, que tu tiens dans tes bras ».
C’est peut-être cela, le plus grand mystère de cette Sainte Nuit, apprendre à arriver les mains vides à la crèche pour recevoir en nos bras le plus grand Bien ! Apprendre à contempler dans cette étable toute la puissance de Dieu, dans un signe insignifiant. Quel contraste entre le ciel et la terre en cette nuit. La cour céleste manifeste la gloire de Dieu, elle chante les louanges du Très Haut, et toutes son attention est fixée sur une étable et une mangeoire.
Contempler cette simplicité, c’est aussi en tirer les conséquences. Ne nous trompons pas de Dieu, en cette Sainte Nuit. Il s’agit bien de vider ses mains pour recevoir le plus grand Bien. Nul besoin de montagne de cadeau pour dire son amour. Ne nous trompons pas de Dieu en cette Sainte Nuit, qui adorons-nous ? Le Seigneur d’Israël venu parmi les siens, ou la déesse convoitise dont le désir est insatiable ?
Car même ceux qui ont côtoyés de très près le Très Haut peuvent tomber dans le panneau. Le petit Juda va bien vite rendre Jésus à sa Mère. Un jour même, ce Juda, échangera son Seigneur contre quelques pièces de monnaie en trahissant la parole de son maître. Il redonnera Jésus à sa mère après la croix, contre une poigné de deniers.
Ne trahisons pas Jésus en cette Sainte Nuit. Restons le petit Juda, dont le nom signifie « louange de Dieu », restons ce petit Juda de la crèche. N’échangeons pas l’enfant Dieu contre quelques pièces de monnaie ou autres futilités. Ne nous trompons pas de raison de nous réjouir. L’ange l’a bien dit aux petits bergers : « car voici que je vous annonce une bonne nouvelle, qui sera une grande joie pour tout le peuple : Aujourd’hui, dans la ville de David, vous est né un Sauveur
qui est le Christ, le Seigneur. » La voici donc la raison de notre joie. Ce n’est pas d’abord des retrouvailles familiales, ou la magie d’une fête avec sa mascotte, (voire même son idole) un vieux monsieur à longue barbe blanche. La raison de notre joie, c’est la naissance du Sauveur, tout le reste (les retrouvailles, les cadeaux, le festin…), tout cela n’existe que pour manifester notre joie d’accueillir le Sauveur.
Et pour l’accueillir, il faut avoir les mains vides, car le Sauveur ne peut sauver ceux qui n’ont pas besoin de lui. Le Sauveur ne peut sauver ceux qui ignorent qu’ils ont besoin d’un Sauveur, ceux qui sont déjà satisfait de ce qu’ils ont.
Alors frères et sœurs, vidons nos mains et remplissons nos âmes et nos cœurs : Dieu est là !
Amen.
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