À un des pires moments de sa vie, quand il est au plus bas, dans sa prison et abandonné de tous, Paul donne un double conseil : celui de garder le dépôt de la foi et celui de faire confiance dans l’Esprit Saint. Une sorte de testament de l’Apôtre qui nous transmet ce qui compte le plus. « Garde le dépôt de la foi dans toute sa beauté, avec l’aide de l’Esprit Saint qui habite en nous. » (2Tim 1)
Paul ne fournit pas ici des consignes précises sur ce qu’il faut faire ou ne pas faire. Il donne plutôt une orientation sur l'esprit qui doit guider chacune de nos actions.
Garder le dépôt de la foi. Certains s’imaginent qu’il s’agit là de faire de la théologie et de l’enseigner. Ça peut en faire partie évidement. Mais le dépôt de la foi, c’est avant tout cette graine de moutarde insignifiante qui est déposée au fond de notre cœur le jour de notre baptême : la présence en nous d’un Dieu qui nous aime et qui nous sauve. C’est cela qu’il faut garder, choyer précieusement et faire grandir. Comme dit Paul à Timothé : « Ravive le don gratuit de Dieu, ce don qui est en toi depuis que je t’ai imposé les mains. » (2Tim 1)
Cette présence divine déposée en nous est appelée à grandir. Et elle peut grandir si on cultive notre foi. Pour qu’une plante pousse, il lui faut du soleil et de l’eau. Pour que notre foi grandisse, il nous faut écouter et parler. La foi grandit et s’affermit dans la mesure où on écoute Dieu et qu’on parle à Dieu. Dialogue avec Dieu en nous, avec Emmanuel, Jésus. Bref, garder le dépôt de la foi, c’est « prier sans cesse », c’est faire tout ce que nous faisons en présence de ce Dieu qui nous aime et qui habite en nous.
Deuxième conseil de saint Paul depuis le fond de sa prison : Tout faire avec l’aide de l’Esprit Saint qui habite en nous. Qui est cet Esprit ? C’est l’Amour de Dieu qui nous est envoyé. Rien de ce que nous faisons ne peut se faire sans l’Amour de Dieu. Tout ce que nous faisons n’est rien si ce n’est fait dans l’Esprit. « J’aurais beau être prophète, avoir toute la science des mystères et toute la connaissance de Dieu, j’aurais beau avoir toute la foi jusqu’à transporter les montagnes, s’il me manque l’amour, je ne suis rien. J’aurais beau distribuer toute ma fortune aux affamés, j’aurais beau me faire brûler vif, s’il me manque l’amour, cela ne me sert à rien. » (1Co 13, 2-3)
Et nous retrouvons là l’idée de l’évangile du jour. Nous sommes des serviteurs inutiles. Même si nous étions des supers serviteurs qui font tout bien comme il faut, nous ne serions vraiment utiles au Royaume de Dieu que dans la mesure où notre action est unie à celle de l’Esprit qui la rend vivante par l’amour.
Nous sommes de simples serviteurs qui ne font que leur devoir. Mais si nous faisons notre devoir avec l’Esprit, alors nous ne sommes plus des serviteurs : nous devenons des amis. « Je ne vous appelle plus serviteurs mais amis » dit Jésus à ses disciples au moment de la Cène.
Ce qui fait la différence entre le serviteur et l’ami c’est que l’ami ne donne pas juste un service, mais il donne son cœur quand il rend service. L’important n’est donc pas tant que le service soit impeccable mais plutôt qu’il soit fait dans l’amour, c’est-à-dire avec l’aide de l’Esprit Saint.
L’amour n’a pas besoin de réussite, il a besoin d’un cœur qui se donne tout entier. L’Esprit Saint n’a pas besoin de notre réussite, il a besoin qu’on le laisse faire à travers notre cœur. Il ne demande pas notre réussite, il exige que nous mettions tout notre cœur à le suivre.
Il y a deux petits signes qui ne trompent pas et qui nous montrent qu’on essaye encore d’être des serviteurs modèles et qu’on étouffe la petite graine de la foi en ne laissant pas l’Esprit Saint faire : Le découragement et la vaine gloire.
Si je me décourage, c’est parce que je compte sur mes propres forces et non pas sur l’Esprit Saint. Si je me décourage, c’est qu’au fond je ne crois pas que c’est Dieu qui me sauve et que je ne lui fais pas encore entièrement confiance. Je m’acharne à réussir alors que Dieu ne me demande que l’acharnement de mon cœur à aimer en toute chose et en toute circonstance. Je me décourage parce que j’oublie que je suis un serviteur inutile appelé à être un ami de Dieu.
Inversement, certains sont pleins de vaine gloire. Ils sont contents d’eux-mêmes lorsqu’ils réussissent quelque chose alors qu’ils n’ont fait que réussir extérieurement sans y mettre la moindre once d’amour. « Ne vous réjouissez pas parce que les démons vous obéissent, mais parce que vos noms sont inscrits dans les cieux. » (Lc 10, 20) Mais si nous faisons les choses avec amour, nous savons bien que notre vraie réussite, celle de l’amour, ne peut pas venir de nous qui ne sommes que des serviteurs inutiles, mais bien du maître qui habite en nos cœurs et nous invite à son festin.
Ainsi : « Garde le dépôt de la foi dans toute sa beauté, avec l’aide de l’Esprit Saint qui habite en nous. » (2Tim 1)